genèse

Genèse d’une aventure familiale

Arnia est un domaine viticole de création récente. Une quasi start-up de la viticulture provençale dont l’origine remonte aux débuts des années deux mille. Il y a deux décennies, mon père et moi avons décidé de célébrer le 21ème siècle naissant en plantant nos premières parcelles de clairette et de syrah. Tout au  bas des coteaux que surplombent les villages de Bonnieux et de Lacoste.

 Bonnieux, construit sur un éperon rocheux qui marque l’entrée de la Combe de Lourmarin est souvent qualifié de Mont-Saint-Michel provençal. Face à lui, sur son nid d’aigle, Lacoste. Ancien fief vaudois qui regarde au levant, ce petit village est surplombé d’un château qui appartint au célèbre Marquis de Sade avant de subir les avanies de l’histoire, puis d’être restauré par André Bouer, professeur d’anglais à la retraite et par Pierre Cardin, couturier.

Arnia, un domaine en Luberon, a été créé dans la continuité d’une exploitation agricole familiale orientée depuis plusieurs générations vers le maraichage et l’arboriculture. Sa vocation était alors de produire des fruits et des légumes qui étaient vendus aux grossistes de Cavaillon, pour alimenter les marchés de Rungis, de Lyon, de la Côte d’Azur mais aussi du Royaume-Uni où nos cerises, nos raisins de table et nos melons étaient fort appréciés.

Bien que dans notre famille nous « cultivons la vigne » depuis fort longtemps, nous ne pouvons pour autant prétendre être vignerons de générations en générations. Et encore moins exhiber blasons familiaux, classement officiel, récompenses diverses et variées, diplômes d’excellence et médailles tels que les arboraient les généraux de l’ex-URSS sur leurs uniformes de cérémonie.

Nous sommes donc une famille néo-vigneronne, animée par le désir de proposer un nouveau modèle de développement territorial et dotée d’une immense passion pour les vins produits en Vallée du Rhône, dans le sud-est de la France, entre Lyon et Avignon. Jour après jour, Arnia se construit au cœur de la région qui chaque soir à la télévision apparait ensoleillée sur la carte des prévisions météorologiques.

Arnia est un projet collectif porté par myself, Michel Blanc (Aka Michaël White), mais pas seulement. Je suis plutôt bien entouré, voire très bien entouré. Je suis né et j’ai grandi ici dans le pays d’Apt. Apt comme Apta Julia et non comme « airport » comme se l’imagina un jour un loueur de voiture exerçant son activité gare de Lyon à Paris (j’ai toujours trouvé cela prêtant à confusion d’appeler gare de Lyon une gare située à Paris…). Apta Julia, ville romaine, dont le théâtre antique était au moins aussi grand que celui d’Orange dans le nord Vaucluse.

Après des études en génie alimentaire et en biotechnologies, en marketing international et en droit de la vigne et du vin, j’ai a occupé (et j’occupe toujours) diverses fonctions managériales pour le compte des vignerons de l’appellation Châteauneuf-du-Pape. Une appellation bénie des Dieux où le grenache règne en maître sur douze autres cépages, fidèles vassaux. Où le soleil d’été vous écrase et le Mistral d’hiver vous fait courber l’échine jusqu’à ce que vous compreniez que le Maître c’est lui et seulement lui !

Arnia est un projet qui s’est construit dans le temps et dans l’effort, en sacrifiant vacances et vie de famille (mea maxima culpa). Un projet porté par la fierté de redonner vie à des parcelles en friche, à des terrasses abandonnées. Un projet motivé par une ambition que l’on pourrait qualifier d’holistique et qui serait de permettre à des « vignes singulières » d’exprimer tout leur potentiel viticole, œnologique et gustatif. Mais pas seulement. Protection de la biodiversité, développement territorial, promotion du slow tourisme, défense des indications géographiques sont autant de facteurs de motivation qui participent à la construction du projet Arnia, que nous tentons de vous présenter sans trop enjoliver la réalité.

Sincèrement et avec une profonde humilité, nous sommes fiers aujourd’hui de vous parler d’Arnia au présent, tant dans le passé le futur nous paru souvent sombre et incertain.

Nous espérons que nos vins seront à la hauteur des espoirs qui nous ont quotidiennement animés ces deux dernières décennies. Et dans l’attente que vous les dégustiez, permettez-nous de prendre des raccourcis en ne parlant ni des soucis d’organisation lorsque l’on a deux métiers, du gel, de la grêle, des pannes mécaniques, des roues crevées la veille des vendanges, des tracteurs dans le fossé… Et nous garderons aussi quelques confidences pour les soirées que nous ne manquerons pas d’organiser si nous réussissons notre pari de commercialiser nos vins avec succès.

Parlons donc de notre territoire tel qu’il se présente aujourd’hui. On pourrait commencer en évoquant nos illustres voisins, réalisateurs, acteurs, producteurs de cinéma, ministres (en exercice ou à la retraite), présidents (de la République, mais aussi de sociétés cotées au CAC 40), couturiers, chanteurs…. Nous pourrions citer les poètes et écrivains qui ont vécu ici et qui ont trouvé les mots justes pour décrire ce que nous ressentons le matin au lever du soleil, à midi au plus fort de la chaleur, et bien entendu le soir lorsque ne résonne plus que le champ des cigales, et qu’au loin, à l’ouest, derrière le village de Goult les cieux se teintent d’un rose à faire pâlir tout ce que la terre compte de toulousains (Toulouse ô Toulouse…). Henri Bosco, Albert Camus, tous les deux enterrés dans le romantique cimetière de Lourmarin, Jean Giono, René Char, Pierre Magnan, Frédéric Mistral (prix Nobel de littérature), et bien avant eux, déjà, François Pétrarque, poète et humaniste florentin qui s’éprit ici de Laure de Noves « qui avait la forme d’un ange » ont apprécié de vivre dans cet arrière pays provençal où le Mistral est devenu calme, les collines ont été érodées, où les horizons se fondent dans le bleu des cieux.

De nombreux peintres ont aussi marqué de leurs talents  l’histoire culturelle de notre pays. Picasso et Cézanne en tous premiers lieux, Nicolas de Staël, Victor Vasarely, Jorge Soteras, Auguste Chabaud, Pierre Ambrogiani, Frédéric Gore, Rahim Najfar et tous les autres, anonymes ou célèbres, qui ont été inspirés par la lumière provençale. Et, ne les oublions pas, les paysans ! Les paysans qui entretiennent les paysages, sculptent les coteaux, colorent les plaines de leurs cultures. Des artistes de la ruralité qui produisent des aliments pour leurs prochains, ouvrent leur maison, partagent leur repas et leurs bouteilles de vin, livrent leurs produits aux restaurateurs adeptes du fait maison et du consommer éthique tel que nous y enjoint depuis maintenant trois décennies Carlo Pétrini, président fondateur de Slow Food et apôtre du «Bon, propre et juste ».

« … Je t’offre des coteaux de vignes, de lourdes grappes de raisins, des figues sucrées, l’eau vive jaillie de la fontaine, d’innombrables chants d’oiseaux, des gorges sinueuses, des refuges bien abrités et l’ombre fraîche des vallons humides »

François Pétrarque